Rupture
6 juin 2003. Un vendredi.
J'ai décidé il y a 5 minutes de quitter l'entreprise et je rédige ma lettre de démission avec un stylo Bic.
La motivation ?
Il n'y en a pas d'apparente.
Les relations avec mes collègues sont cordiales. Certains sont devenus mes amis.
Mon travail est très intéressant. Des déplacements réguliers à travers toute l'Europe pour superviser la gestion financière.
C'est beau et reposant, la terre vue d'un avion.
Des rencontres aussi, beaucoup de rencontres.
Des gens intéressants, d'autres moins. De grands hôtels. A 31 ans.
La réussite.
Alors ?
Alors
je rédige calmement une lettre de démission que je déposerai tout à
l'heure, sans un mot, sur le bureau de Mr X., mon patron.
Je revois la scène.
Il lit la lettre une première fois, enlève ses lunettes et me fixe quelques secondes, incrédule.
Je ne dis rien. Il remet ses lunettes et lit la lettre une seconde fois.
Puis il me demande "combien voulez-vous ?".
Je ne comprend pas. Il précise "combien voulez-vous pour rester chez nous ?".
Ce
que je lui réponds le déstabilise. Je le vois. Peut-être est-ce la
première fois qu'il est confronté à une situation aussi absurde.
J'ai toujours été ce qu'on appelle un "salarié modèle", efficace et sur lequel on pouvait compter.
Je n'ai jamais été en conflit avec ma hiérarchie.
Alors
un départ soudain, sans signe avant coureur et dépossédé de la seule
raison valable à ses yeux: un travail mieux payé ailleurs ?
Incompréhensible.
Une poignée de main et je le quitte, presque sans un mot.
Dans mon bureau, je rassemble quelques affaires et je pars.
Je n'ai rien dit à mes collègues.
A quoi bon.